Idées

Architecture hospitalière éco-responsable

Clément Billaquois, Franck Courari, Hugo Viellard, Garcie de Navailles

Introduction : enjeux et limites

Le secteur de la santé joue un rôle important dans les émissions de carbone. En France, il représente environ 34 MtCO2e, soit 6,9% de l’empreinte carbone du pays (1). Ce chiffre varie de 4% à 8% dans les pays de l’OCDE.

Le Shift Project (2) propose la décomposition des émissions du secteur de la santé en trois scopes. 1

Si l’on s’intéresse plus spécifiquement à l’empreinte carbone d’un projet d’hôpital, il faut distinguer d’une part les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la construction, qui sont comptabilisées dans le secteur du bâtiment, et celles liées à l’exploitation et au fonctionnement du bâtiment, comptabilisées dans le domaine de la santé.
Les dispositions architecturales ont bien sûr un impact sur les premières (construction), mais aussi sur les secondes (exploitation et fonctionnement) dans la limite des scopes 1 (émissions directes) et 2 (émissions indirectes liées à l’énergie).

Ce préambule permet de préciser les limites de la démarche entreprise par l’architecte, puisque les émissions du scope 3 restent en général majoritaires dans les bilans carbone des hôpitaux (les scopes 1 et 2 ne représentent que 16% de l’empreinte carbone totale), tout en étant par ailleurs beaucoup plus difficiles à quantifier. 2

Ainsi, s’il est nécessaire de chercher à diminuer les postes des scopes 1 et 2, il est impératif de mener par ailleurs une réflexion plus globale sur l’ensemble de l’impact carbone d’un hôpital pour agir également sur le scope 3 (la question de l’emplacement de l’hôpital et de son accessibilité en transports en commun par exemple est cruciale pour diminuer le poste lié aux trajets domicile-travail des employés).

L’hôpital est un bâtiment complexe issu de la synthèse d’enjeux contradictoires :

  • Enjeux fonctionnels (liés à la qualité d’usage, des flux internes et externes, des distances parcourues, etc.) ;
  • Enjeux techniques (liés à l’utilisation de matériel complexe et encombrant, à la présence d’un très grand nombre de réseaux de natures différentes tels que chauffage, ventilation, désenfumage, courant fort, courants faibles, fluides médicaux, etc.) ;
  • Enjeux urbains (liés à la position et la taille souvent importante de ce projet) ;
  • Enjeux normatifs (liés à la sécurité incendie, à l’hygiène, aux assurances et aux modes de construction) ;
  • Enjeux architecturaux (liés à la qualité spatiale, l’hôpital étant avant tout un lieu d’accueil) ;
  • Enjeux économiques.

C’est sans doute à cause de cette complexité que les nouvelles normes environnementales (RE2020) ne sont toujours pas applicables pour les hôpitaux alors qu’elles existent pour d’autres bâtiments (logements, bureaux…).
À ce titre, il convient de noter que la future démarche RE2020, avec l’application de l’arrêté réglementaire environnemental du 10 avril 2017 concernant toutes les nouvelles constructions de bâtiments publics, prendra notamment en compte les enjeux liés au carbone qui ont et auront un impact fort sur les projets immobiliers hospitaliers, tant sur les matériaux employés pour la construction que sur la nature des systèmes techniques mis en oeuvre.

Un projet de construction d’un hôpital peut agir sur plusieurs éléments pour limiter son impact carbone. En effet la conception du projet a un impact direct sur :

  • La consommation d’énergie future du projet ;
  • Les émissions de CO2 et la possibilité de réaliser une architecture bas-carbone ;
  • L’exploitation future du bâtiment et sa capacité à tolérer le changement pour le prémunir contre le risque de l’obsolescence. Car le meilleur moyen de faire des économies de CO2 reste encore ne pas construire !

Nous proposons ainsi quelques pistes que nous mettons en oeuvre dans nos projets pour répondre à ces enjeux de consommation, de construction et de résilience.

  1. Enjeux de la consommation d’energie

Les hôpitaux sont par nature de grands consommateurs d’énergie. Ils fonctionnent 24h/24 et 7j/7.
Les conditions d’hygiène imposent un fort renouvellement d’air, ce qui a un impact à la fois sur les consommations d’électricité puisque des centrales de traitement d’air opèrent en permanence, mais aussi sur les déperditions thermiques à cause de l’évacuation de l’air intérieur, ce qui augmente les besoins de chaud ou de froid en fonction des saisons (jusqu’à 10 volumes / h dans les blocs opératoires).

Certains process nécessitent de grandes consommations de chaleur (stérilisation, cuisines, etc.) et engendrent un besoin d’énergie pour être rafraîchi qui est supérieur à celui pour être chauffé.
En effet, produire une frigorie (i.e. rafraîchir de 1 degré) nécessite deux fois plus d’énergie que pour produire une calorie. Or, dans un contexte de réchauffement climatique, cela entraîne intrinsèquement une augmentation des consommations énergétiques à cause des besoins de froid.
Si bien que la consommation d’un hôpital est de 250 kWh/m²/an alors qu’elle n’est que de 50 kWh/m²/an pour les logements neufs.

Les marges de manoeuvre sont faibles au regard de ces enjeux de consommation sauf à changer les normes d’hygiène et accepter des températures supérieures ou inférieures dans les locaux, ce que ne font pas les cahiers des charges que reçoivent les architectes pour la construction de leur projet.

Les principaux leviers techniques que nous mettons en oeuvre sont les suivants :

  • Conception « bioclimatique » des façades (limiter les apports solaires en été et les maximiser en hiver) et Isolation thermique performante (réduire le chauffage et le refroidissement), voir le projet de l’Hôpital Nord Franche Comté développé ci-après ;
  • Récupération d’énergie dite fatale (3) ;
  • Connexion à un réseau de chaleur, géothermie, panneaux solaires (production d’énergie renouvelable) ;
  • Mise en place d’une ventilation double flux systématique des locaux avec récupérateur à haut rendement et moteur à basse consommation, de pompes secondaires à vitesse variable et à basse consommation, et de gaines et tuyauteries qui recevront un calorifugeage haute isolation (limiter les déperditions).

Tous ces principes représentent un surcoût vis-à-vis d’une construction standard sur l’investissement initial : les isolations plus performantes sont plus chères, les dispositifs de façades bioclimatiques tels que les brise-soleils orientables coûtent plus cher qu’un simple volet roulant. La mise en place de systèmes de récupération d’énergie comme l’utilisation d’équipements à haut rendement ou basse consommation représente également un investissement supérieur. Toutefois, une analyse de cycle de vie peut permettre de mettre en balance le temps de retour sur investissement vis-à-vis du surcoût initial.

Enveloppe bioclimatique : exemple de l’hôpital Nord Franche-Comté
Le nouvel hôpital Nord Franche-Comté, fusion des hôpitaux de Belfort et de Montbéliard 3, prend place sur un terrain en pente de 25 hectares de la commune de Trévenans. Le projet s’inscrit en position haute du terrain et étire un volume longiligne de 210 m de long par 98 m de large le long des courbes de niveau. Il tire parti de la déclivité du terrain naturel pour séparer les flux (voie d’accès des urgences en partie haute, et parvis public en partie basse) et offrir aux unités d’hospitalisation des vues lointaines sur le paysage, jusqu’à l’orée de la forêt des Vosges.

Le projet conjugue deux ambitions pour l’hôpital : celle d’une «machine à soigner» rationnelle et évolutive, et d’un lieu de vie porté par le souci du bien-être des patients comme du personnel. Ainsi, la présence rassurante du bois se retrouve à la fois en façade (protégé entre deux panneaux de verre respirant), et dans les espaces intérieurs, en particulier dans le hall-rue ponctué d’atriums qui s’ouvrent généreusement sur les patios, brouillant les frontières entre l’intérieur et l’extérieur. 4

Le bâtiment développe des façades en bandeau : chaque trame de façade dispose donc d’une fenêtre sur allège à 45cm, d’une largeur de 125cm et d’une hauteur de 200cm. La mise en oeuvre des façades est la plus performante possible : elles sont isolées par l’extérieur et « respirantes». 5 En outre, l’utilisation du verre confère une grande pérennité à cet ensemble.
Le vitrage transparent et l’allège de faible hauteur (45cm) offrent au patient allongé une vue panoramique sur le paysage à l’extérieur. 6

  1. Construction bas carbone

La provenance des matériaux de construction et leur nature jouent un rôle majeur dans l’impact carbone de l’acte de construire. Ce qui implique de chercher autant que possible à réduire la consommation de ressources.

Premièrement, la construction d’un bâtiment hospitalier intervient souvent dans un site constitué. Il est alors possible, si le maître d’ouvrage le souhaite, de démolir le moins possible et d’éviter toutes les constructions temporaires et les rocades, qui induisent des surcoûts et des déchets.

Il faut ensuite avoir une attention particulière sur les matériaux de façade qui doivent être choisis pour leur durabilité.
Par exemple, le verre est un matériau inaltérable et ne nécessitant aucun entretien, mais avec un impact carbone fort (comme tous les matériaux nécessitant une cuisson). Il doit donc être employé au bon endroit en fonction du budget du maître d’ouvrage.

Certains matériaux comme la pierre massive sont extrêmement pérennes et à l’impact carbone limité (en effet l’impact carbone de la pierre est quasi nul : on déplace littéralement un morceau de sol inerte vers un autre endroit, les seules émissions étant celles liées au transport). Ils représentent toutefois un coût élevé qui doit être anticipé.

Mais il est aussi possible de recourir à des matériaux biosourcés comme le chanvre pour mettre en oeuvre des façades constituées de béton de chanvre et le bois en ossature. Ces techniques sont toutefois difficiles à mettre en oeuvre car elles sortent du cadre réglementaire et normatif. En effet, il n’existe pas forcément de DTU ou d’avis techniques pour ces méthodes de construction relativement nouvelles.

Ensuite, pour les intérieurs, on peut chercher à utiliser un maximum de produits vertueux, locaux ou recyclés et à limiter leur quantité :

  • On peut se passer de revêtements intérieurs et laisser au maximum les supports bruts : bois, béton pour la limitation des quantités de peintures et de faux plafonds. Ce n’est toutefois pas toujours possible pour des questions d’hygiène ou de pérennité ;
  • Il est possible de réaliser des partitionnements légers en fibres de cellulose, fibres minérales, plaques de gypse (30 % de cellulose) plutôt qu’en plaques de plâtre, mais pour un prix trois fois supérieur ;
  • Les éléments en béton peuvent être réalisés à 60% en béton recyclé (utilisation de laitiers ou de cendres recyclées dans la formulation du ciment) ;
  • Le béton peut aussi être « local » en fonction de la localisation du projet (moins de 50 km du site pour les granulats et le ciment).

L’hygiène reste souvent le principal impératif lors de la conception d’un hôpital. Celui-ci doit se nettoyer facilement pour éviter la propagation de microbes, mais également limiter le nombre de procédures de nettoyage différentes pour réduire les coûts d’entretien.
L’utilisation de matériaux écologiques biosourcés s’avère souvent complexe.
Le bois apparent est quasiment interdit dans les locaux devant être nettoyés régulièrement. Il ne peut être ni dans les sols, ni les parements, ni les meubles… où il est bien souvent remplacé par du PVC ou du stratifié.

Le PVC (issu de l’industrie pétrochimique) qui est employé dans la plupart des hôpitaux pourrait être remplacé par du carrelage ou des sols en caoutchouc. Toutefois le coût est supérieur, et les performances pas toujours équivalentes (classement UPEC).

Construire un hôpital en structure bois est aussi très complexe : l’encombrement des poutres dans les faux plafonds implique d’augmenter la hauteur des bâtiments et donc le coût, et la stabilité au feu nécessite soit des discussions parfois complexes avec les services de sécurité incendie, soit d’encoffrer les structures bois avec du plâtre (générant là-aussi un surcoût important, en plus d’une utilisation de la matière peu vertueuse).

Les matériaux biosourcés se nichent alors dans des espaces invisibles : laines végétales pour les isolants acoustiques et thermiques, faux plafonds en fibres végétales, mais toujours pour un coût supérieur et rarement compatible avec le budget du maître d’ouvrage.

  1. Une architecture résiliente

Nous constatons que les hôpitaux neufs que l’on construit aujourd’hui sont appelés à remplacer des hôpitaux construits dans les années 1970 voire 1980. C’est le cas des hôpitaux de Tours, Caen, Cannes, Chambéry, Rennes, Bichat et Beaujon, etc.
Soit parfois à peine une cinquantaine d’années après leur construction.

Cela est dû pour l’essentiel à :

  • L’accélération des progrès et techniques médicales (l’apparition de nouvelles machines, nouvelles méthodes induisant un nouveau paradigme spatial et technique) ;
  • La création de nouvelles disciplines ;
  • La diminution de l’hospitalisation au profit du plateau technique ;
  • L’évolution des normes incendie, environnementales, etc. ;
  • L’usure prématurée de bâtiments utilisés 24h/24 et 7j/7.

Ces évolutions rendent les bâtiments obsolètes et difficilement réutilisables. Ils finissent souvent démolis.
Forts de ces constats, nous estimons que notre devoir d’architecte en matière d’écologie, lorsqu’il doit concevoir un hôpital, est de faire en sorte que celui-ci puisse durer le plus longtemps possible.
Doubler la durée de vie des hôpitaux permettrait de limiter les consommations de ressources lors de sa construction (terres agricoles, matériaux, énergie…).

Pour espérer une durée de vie plus longue, l’architecte doit s’efforcer de retenir les leçons de ses prédécesseurs et concevoir un bâtiment qui résistera aux évolutions tant médicales que normatives.

Nous avons mis en place dans notre pratique une série de règles qui nous aident à créer des hôpitaux à même de repousser au maximum l’obsolescence de nos bâtiments :

  1. Forme compacte ;
  2. Trame neutre ;
  3. Structure évolutive / Flexibilité ;
  4. Hauteur d’étage uniforme / Isotropie.

Et peut-être même imaginer dès sa construction ce que pourrait devenir le bâtiment lorsqu’il ne sera plus un hôpital.

Compacité :
La médecine évolue beaucoup plus vite que l’architecture. Les projets hospitaliers se développent sur de nombreuses années, parfois jusqu’à la décennie voire davantage.
Fort de ce constat, et pour lutter contre l’obsolescence des bâtiments, l’agence Brunet Saunier & Associés a mis au point, dans les années 2000, le « monospace », une typologie simple et rationnelle qui permet une grande flexibilité en matière d’organisation des fonctions hospitalières. 7
Le monospace n’est pas un type en soi. Il apporte une réponse à l’instabilité programmatique en offrant un dispositif spatial régulier, réversible, permettant de développer de grands plateaux continus bénéficiant tous d’une épaisseur constante et d’un très fort accès à la lumière.
À l’image des géométries fractales, cette forme compacte dispose ainsi d’un linéaire de façade très développé : comme sur une éponge de Menger, la surface de contact avec l’extérieur est multipliée. 8
Cette morphologie ou structure simple et rationnelle permet à chacune des parties qui la composent de s’étendre ou se compresser sans que l’équilibre de l’ensemble ne soit remis en cause.
Le monospace est davantage un milieu qu’une forme. Il est un espace continu et neutralisé par la réduction à l’essentiel et la répartition unitaire des éléments différenciant et orientant.
Les différents services d’un hôpital, hétérogènes dans leurs fonctions comme leurs dimensions, sont ainsi contenus à l’intérieur d’une forme simple et unitaire, un prisme intelligible, dont l’apparente simplicité témoigne de la maîtrise savante de la complexité du projet. Contrairement aux apparences, il est en effet très difficile d’obtenir une forme simple qui accueille toutes les fonctions pourtant si hétérogènes.
En outre, la compacité et la simplicité de la forme répondent à un autre optimum : celui du coefficient de forme du bâtiment (4) (i.e. le rapport de la surface totale d’enveloppe et du volume habitable d’un bâtiment. Ce coefficient dépend directement de la forme du bâtiment, et donne un indicateur direct des déperditions possibles et donc des consommations énergétiques).
La singulière compacité de cette morphologie travaille à rapprocher les services entre eux, à réduire les distances à parcourir, à favoriser les synergies et les collaborations.
Cette forme homogène est pensée pour ne pas subir l’avenir. Au contraire, elle anticipe l’évolution constante des pratiques hospitalières en n’assujettissant pas l’apparence du bâtiment aux fonctions qu’il abrite et susceptibles de rapidement changer.
Ainsi la forme simple et unitaire est garante à la fois de la qualité fonctionnelle et de la performance thermique du bâtiment.

Trame neutre :
Dans nos projets, nous proposons la mise en place d’une trame neutre dans toutes les directions.
La neutralité du plan se caractérise par un maillage rigoureux qui s’appuie sur une grille homogène servant de guide à l’implantation des poteaux. Le projet est ainsi conçu comme une stratification de plateaux homogènes où l’impact des points porteurs est banalisé par la régularité de leur implantation.
À l’intérieur de cette grille, toutes les substitutions sont possibles, tant pendant les études qu’après la mise en service du bâtiment.
Elle accueille sans distinction plateaux techniques et hébergements. Tous les services, modules ou locaux, peuvent y trouver leur place. 9
Ce dispositif régulier limite le nombre de points porteurs et évite toute rigidité liée à des voiles structurels en plan. La trame permet d’apporter une réponse simple et intelligible à un problème complexe. Elle permet d’implanter le long d’une circulation hospitalière toute la variété de tailles de locaux que l’on peut rencontrer dans un programme de construction : 8, 12, 18, 24, 36 m² et ainsi de suite…

Structure évolutive :
Ces plateaux sont ensuite percés régulièrement de grandes cours de 15m de large par 15 à 20m de long qui font pénétrer la lumière jusqu’au coeur du plan. Ainsi, l’épaisseur bâtie est constante et toujours assurée de bénéficier de lumière naturelle. 10
Bien qu’il paraisse particulièrement ordonné, le principe régulateur n’en demeure pas moins plastique. Organisée le long d’un axe (circulation générale et points de montée), la figure n’est pas fermée.
Elle peut encore s’étendre, s’agrandir, se transformer tout en gardant sa cohérence interne.
Entre chaque cours/patio, le projet permet la mise en oeuvre de modules qui peuvent se combiner entre eux pour créer des services plus vastes : c’est souvent le cas de grands services comme les blocs opératoires, la pharmacie ou la dialyse, qui s’étendent sur plusieurs modules et bouclent entre eux le long des patios. 11, 12, 13
Enfin, les patios peuvent être considérés comme des potentiels d’extension. On pourra ponctuellement les densifier, bâtir une terrasse ou combler une loggia.

Isotropie :
Pour être reconfigurable à l’infini, le bâtiment n’est pas la traduction formelle d’un besoin fonctionnel particulier, mais un système, une forme sans composition, sans partition.
Cette recherche conduit à concevoir des façades également évolutives, et les plus généreuses possibles. La mise en oeuvre de façades homogènes, dans le rythme des percements et continues à chaque étage et sur toute la périphérie du bâtiment, permet à chaque mètre linéaire de façade de disposer d’une fenêtre, sans qu’aucune partie pleine ne vienne grever l’évolutivité des locaux.
Ainsi faites, les façades sont isotropes : elles ont les mêmes caractéristiques dans toutes les directions.
Ce choix permet de traiter par l’utilisation de protections solaires extérieures et orientables, toutes les situations d’ensoleillement.
Les grandes proportions de surface vitrée permettent une autonomie lumineuse très élevée, ce qui réduit les consommations électriques liées à l’éclairage.
Enfin, la hauteur des étages doit être dans la mesure du possible la même partout. Il devient alors possible d’effectuer les substitutions de programme entre eux et à tous les niveaux.

En guise de conclusion

L’exemple de l’hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris Nord : Une Architecture résiliente

L’Hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris-Nord, icône de la Santé du 21ème siècle, est une infrastructure médicale de pointe, humaine et performante, idéalement conçue pour faire face aux besoins croissants de la métropole parisienne dans les décennies à venir. 14, 15, 16
Généreusement ouvert sur la ville, l’hôpital propose un volume clair et identifiable, qui s’érige en repère dans l’espace urbain. Son accessibilité est renforcée par une emprise au sol réduite. L’hôpital compact fait ainsi don à la ville de larges abords plantés, d’une forêt urbaine et d’un ample parvis minéral.

Ces grands jardins, plantés à la fois au sol et sur le toit, participent à réduire l’effet d’îlot de chaleur. Ils permettent aussi une meilleure gestion des eaux de pluie. Ces jardins témoignent ainsi de préoccupations contemporaines environnementales, tout en affichant une image résolument tournée vers la préservation de la biodiversité. Ces jardins sont le symbole d’une institution qui place l’humain au centre, et fait du bien-être des patients sa priorité, reprenant à son compte l’aphorisme latin « Medicus curat, natura sanat » (le médecin soigne mais c’est la nature qui guérit).
L’espace public se prolonge jusqu’à son seuil, offrant une respiration dans le tissu urbain, des lieux de rencontre, d’échange et de calme. Largement vitré, l’hôpital s’ouvre aussi par sa transparence et les liens visuels qu’il tisse entre extérieur et intérieur. La présence végétale à différentes échelles et à tous les niveaux du bâtiment participe, outre son rôle curatif indéniable, à faire de ce lieu un havre de sérénité. Cette proximité visuelle et physique avec une flore abondante, la possibilité de suivre la course du soleil et celle des saisons, offre aux résidents de l’hôpital une formidable allégorie du processus de guérison. Ce cadre de résidence, de travail, ou de simple visite, place le bien-être au centre de l’expérience du soin.

La toiture de l’hôpital est un monde à part. Planté de nombreuses espèces végétales et protégé des nuisances de la rue, le jardin qu’elle accueille est un refuge ouvert à tous, soignants, visiteurs et citadins. Accessible depuis l’hôpital comme depuis la ville, il est un promontoire qui surplombe les bâtiments alentours et procure une vue large et dégagée vers un horizon lointain. Voir loin, au-delà de l’hôpital, c’est en effet regarder au-delà de notre environnement immédiat, penser à l’avenir, et oublier le temps d’une promenade ou d’un déjeuner, un quotidien parfois difficile. Ses proportions, similaires à celles du Jardin du Palais Royal de Paris, et son caractère public confèrent au jardin sa dimension remarquable. Aérienne et végétale, la toiture devient alors un lieu d’abstraction, de répit, une échappatoire.

L’hôpital ouvert et urbain est aussi une exigeante machine à soigner, à la hauteur des niveaux de performance, d’adaptabilité et d’efficience auquel elle s’adresse. La technologie qui sous-tend sa conception joue un rôle capital dans sa faculté à répondre aux enjeux sanitaires d’aujourd’hui et de demain. La superposition de plateaux équipés, neutres, réversibles et abondamment éclairés de lumière naturelle, permet une organisation spatiale souple et évolutive des services.

Cette conception radicale écarte tout artifice non essentiel et concentre ses efforts sur la capacité d’adaptation de l’équipement de santé, en temps réel comme à long terme. Ainsi préparé, l’Hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris-Nord devient un outil fiable aux mains des personnels soignants pour assurer la prise en charge bienveillante et sereine des patients.

Construire un hôpital aujourd’hui consiste à concrétiser le changement, et l’Hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris-Nord en est le lieu emblématique. Les effectifs, les patients et leur état, les techniques et les besoins évoluent en permanence. Le mouvement et l’imprévu sont les seuls invariants à prendre en compte. Conçu pour pérenniser l’inconstant, l’Hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris-Nord arbore la flexibilité comme une philosophie en s’inscrivant durablement dans la ville sans ne jamais cesser de muter ni de s’adapter.

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